Sur les routes de la soie : Introduction

Pour le 20ème anniversaire de l’Indépendance de l’Ouzbékistan a été publié en 2018 un recueil Les Contes des Routes de la Soie. Ce titre peut vous perturber, et ce, légitimement : en France, à l’école comme dans certaines publications, nous avons l’habitude de dire LA route de la soie par métonymie. En diffusant épices, matières premières, tissus, céramique et écrits, Les Routes de la soie incarnent la transmission de pratiques culturelles, de patrimoine matériel et immatériel par excellence. Elles furent une source d’inspiration à bien des récits, dont le fameux Livre des merveilles de Marco Polo. 

Il s’agit en réalité d’un réseau de route terrestre et maritime partant des confins de la Chine jusqu’à l’empire séleucide (305 – 64 av. J.-C.), puis Perse sassanide (…) et enfin Romain (-17 à 1492). Ce réseau commercial a débuté, selon les historiens chinois, vers 125 avant notre ère, durant la dynastie de Han (206 av. – 220 ap. J.-C.). Ces routes sont ponctuées de villes incroyables, point d’arrêt et de comptoirs afin de permettre aux caravaniers de s’arrêter et/ou de troquer leur marchandise avant de repartir. Il s’agissait du pont qui permettait de relier deux empires qui équilibrent le balancier géopolitique de part et d’autre du continent eurasiatique. 

On retrouve déjà dans les textes romains du premier siècle le goût prononcé des Romaines pour des étoffes de soie légères dont la transparence vient à choquer les plus conservateurs. Ces taffetas sont, pour eux, le produit des Sères qu’ils assimilent aux Chinois alors qu’il s’agit en réalité d’un terme utilisé pour les communautés de steppes qui produisent cette « laine de la forêt ». 

Au XIème siècle, les Croisades relancent le commerce vers l’Occident, faisant de villes européennes les points d’aboutissement des routes : en Italie, Venise et Gênes, en France Lyon, aux Pays Bas, En Espagne. Au XIIème siècle, Marco Polo est le premier occidental à parcourir ces routes entre 1260 et 1295 alors que la Chine est gouvernée par la dynastie mongole de Yuan (1271 – 1368). Toutefois, la chute de la dynastie, avec l’expansion des empires de l’Islam entraîne le déclin des routes terrestres, bien que les voies maritimes restent pratiquées. 

Bien que ces routes soient connues et pratiquées, aucune d’elles ne possède le nom de Route de la soie. Il faut toutefois attendre le XIXe siècle, alors que les puissances occidentales tentent de s’ingérer politiquement et économiquement dans l’empire chinois des Qing (1644-1912) pour trouver la première mention « des routes de la soie » :  Karl Riter, nomme ces axes Les Routes de la soie en 1832 alors qu’il étudie les relations commerciales d’Asie centrale. C’est sa traduction en anglais qui la réduisit l’expression au singulier : La Route de la soie est ainsi devenue l’expression commune. 

La postérité n’a gardé que l’image d’Epinal : des caravanes parcourant le désert, des comptoirs aux discussions animées d’où émanent les effluves de parfums et d’épices, des étals de soie venue directement de Chine. Au-delà des biens matériels, c’est l’histoire d’hommes, de traditions, de pensées qui ont fait ces Route de la soie. Elles sont bien plus riches que ce que l’on peut imaginer : c’est pourquoi FORWEAVERS vous offrira chaque mois un article sur l’histoire des routes de la soie à travers l’un de ses pays, ses traditions et comment il s’est aujourd’hui réapproprié ce passé.